Les institutions musicales à Versailles

INTRODUCTION

– Véritable instrument de la propagande royale. Elle se décline à travers les institutions administratives, les spectacles et fêtes commandés, les musiciens que le roi recrute et protège, enfin par toutes les œuvres qui témoignent de l’intense activité musicale du règne.

1 – Le roi s’occupe de sa musique

* nomination: ex. Lully surintendant de la mus en 1661. Volonté de s’assurer un représentant efficace et impitoyable.
* Concours pour recruter des éléments expérimentés (ex. concours pour les sous-maîtres de la Chapelle; le plus grandiose en 1683).
* hiérarchie administrative qui reflète le parti pris de centralisme du régime: sous L XIV la mus connaît un haut degré d’organisation.

2-Importance de la musique à la cour et dans la famille royale : un employeur

– La musique à la cour rythme tous les actes de la vie monarchique, elle est nécessaire au bon fonctionnement de la cour et elle manifeste (comme les autres arts) la puissance et le rayonnement du souverain au XVIIe (Louis XIII-Louis XIV).
– La présence de la musique fait partie de la vie aristocratique et royale, même si tous ne se passionnent pas pour cet art (ex. de la reine Marie-Thérèse, femme de Louis XIV, ou au contraire du Grand dauphin, fils aîné de L. XIV passionné d’opéra). Ou encore Mme de Maintenon qui se plie aux représentations musicales pour faire plaisir à son époux plus que par goût personnel. Tente de le détourner de l’opéra.

– La cour est l’employeur et même l’allié le plus sûr de l’artiste : le roi bien sûr possède sa musique mais également les membres de la famille royale qui possèdent une maison musicale
* reine Marie-Thérèse, fille de Philippe IV d’Espagne. H Du Mont y est employé (comme claveciniste de 1660-1663). Entretient sa maison par tradition (environ 20-25 artistes). Tremplin pour la maison du roi.
* le Grand Dauphin, fils aîné de L XIV (1661 et qui meurt en 1711) : a sa propre chapelle. Quand il ne va pas à la messe du roi, il fait appel à M-A Charpentier pour la composition d’œuvres religieuses destinées aux messes. Organise des fêtes à Meudon1, prisées par l’aristocratie. L XIV lui-même se rend pour écouter les musiciens de son fils : il y apprécie les œuvres de Charpentier. En 1681, le roi s’est rendu à St-Cloud2 et a congédié ses propres musiciens pour entendre ceux du Dauphin et les motets de Charpentier (Le Mercure mars 1681).
* on peut citer encore le duc et la duchesse de Bourgogne, petit-fils de L XIV (mort en 1712). Le duc apprend le clavecin avec Couperin.
* parmi les bâtards, le duc du Maine et surtout sa femme, Louise-Anne de Condé qui mène les Grandes Nuits de Sceaux au début du XVIIIe. Les plus fastueuses : celles de 1714-1715. Jean-Joseph Mouret est surintendant de la musique de 1709 à ca 1730. La duchesse est insomniaque, adore le théâtre (elle joue elle-même) et les fêtes. Elle entraîne son mari dans des dépenses fastueuses => personnage haut en couleur mais protectrice des artistes.
* le duc d’Orléans Philippe II : se passionne pour la musique, étudie la composition avec M-A Charpentier. Entretient une maison musicale italianisante. Grande importance de cet art dans sa vie.

MUSICIEN A LA COUR

– Le musicien est en service commandé : “servir la propagande monarchique : voilà la raison d’être du musicien du roi.” (M. Benoît, Les Musiciens du roi de France, op. cit., p. 77). “L’histoire du roi se grave, se peint, se tisse, se chante…” (ibid).
– Il n’y a pas de remise en cause de cette “servitude” : conscience de servir une nation à laquelle il est fier d’appartenir.
– le roi peut prêter ses musiciens au dauphin, aux princes de sang et même à des moins nobles (Foucquet, avant son arrestation) : la propagande s’étend ainsi au delà du service royal.

I – Artiste ou artisan ?
– Le musicien est mêlé à l’élite sociale de son temps et vit grâce à elle
– La cour : temple du goût, microcosme de l’élite artistique

– Mais il doit répondre à la consommation importante de musique à la cour : les personnalités les plus mélomanes en entendent tous les jours.
– Sa tâche comporte un aspect assez “humble” (ibid. p. 78) : il doit se soumettre à un événement, une commande, un enseignement (ex de Couperin accaparé par ses tâches à la cour et qui ne peut éditer ses pièces du livre I qu’en 1713). Ex de commande : Le Bourgeois Gentilhomme de Molière et Lully (en 1670) ou les fêtes des Plaisirs de l’Ile enchantée (en 1664).
– Le renouvellement de musique doit se faire assez souvent, d’autant qu’il y a peu de musique étrangère jouée à la cour, ce qui explique les réorganisations comme celle de la Chapelle (4 sous-maîtres en 1683 pour accroître la variété des compositions).
– Enfin la musique est composée pour le moment présent, pour les circonstances. Ce qui n’exclut pas le déploiement du talent. DONC Artiste autant qu’artisan.

II-Statut du musicien du roi
Emploi de prestige
– Un groupe de serviteurs qualifiés parmi les autres
– Mais un emploi à la cour est prestigieux : il permet d’asseoir sa réputation mieux qu’un musicien de la ville.
– La charge qu’ils occupent est gratifiante, c’est un accomplissement
* ex les musiciens de la chambre qui font la navette entre Paris et Versailles et sont en relation avec l’aristocratie et la riche bourgeoisie
– Encore des difficultés de nos jours pour bien connaître les rouages administratifs et le recensement des musiciens. Il existe une grande diversité de statuts.

Recrutement
– De plus les recrutements ne sont pas tous les mêmes : sur désir du roi (compositeur de la chambre), sur concours ou encore par l’achat d’un office (la “vénalité”).

– Malgré la complexité du système, on peut distinguer deux types de musiciens : les officiers et les non officiers.

A – Musiciens officiers
– Recouvre un titre et une fonction
– Ils doivent acheter leur “office” mais ils en sont ensuite propriétaire : peuvent le transmettre, le revendre.
– Cette charge leur rapporte des gages => c’est donc un capital.
– C’est aussi une position enviable et rentable financièrement
– Le nombre des officiers est limité et constitue un cadre assez fixe sous Louis XIV et Louis XV : on peut dénombrer une centaine de charges environ. Elles ne correspondant pas toutes à 100 musiciens : certains chantres de la Chapelle par ex. possède 2 charges pour 2 semestres, donc 1 musicien pour 2 charges d’officiers (cf M. Benoît, op. cit., p. 186). De même il peut acquérir 2 charges différentes dans le même département. (cf les cumuls de Lully et de Delalande) (M. Benoît, Que-sais-je, p. 58).
– Les officiers ont les mêmes devoirs et occupations que les autres musiciens du roi (les “ordinaires”). Titre et fonction se superposent
– Les officiers peuvent se faire remplacer : ils confient prérogatives et travail à leur remplaçant.
– Il y a 3 conditions pour acquérir une charge

* l’accord du roi
* la capacité du demandeur (pour remplir la fonction) => à nuancer, car le titre de l’office ne correspond pas tjrs à la fonction (ex de chanteurs à la Chapelle).
* la possession de la somme nécessaire à l’achat

– Le recrutement se fait le plus souvent après que le musicien ait fait ses preuves chez le roi. Il peut être recommandé par un haut personnage ou encore être recruté par voie de concours, ce qui n’exclut pas les trafics d’influence (être appuyé par une personne bien en cour est tjrs une aide… par une maîtresse du roi, par Lully, etc.). Exemple en 1683, pour le concours de sous-maître à la Chapelle : Colasse est appuyé par Lully (c’est son collaborateur) et Delalande par Louis XIV.
– L’avis du roi compte bcp et lui-même peut trancher lors de certains concours : 1693, il tranche en faveur de Couperin comme organiste de la Chapelle royale. (Benoît, Que-sais-je, p. 54-56). De même choisit Delalande en 1683, lors du concours de sous-maître de la Chapelle.
=> sorte de consécration ou de titularisation, même s’ils doivent débourser pour acheter la charge
– Pour l’achat, il arrive que le vendeur consente un prêt ou que l’acheteur s’endette.
– Le prix des charges varient de 1500 l. t. (pour les plus basses) à 25 000 l. ou même 30 000 l. (maître de musique de la famille royale). Une charge de htb de l’Ecurie : 4000 l.t. (Benoît, Que sais je, p. 58). La charge de surintendant vendue à Destouches par la veuve Delalande : 10 000 l. (id, p. 57). Sommes importantes pour des petits budgets.

B – Les musiciens non officiers
1 – Les musiciens ordinaires
– Ils reçoivent un brevet du roi
– Leur titre indique leur fonction : ils servent le roi avec régularité ; leur présence est déterminé par la nature de leur emploi. Ainsi les chantres de la Chapelle chantent tous les jours (leur charge est par semestre cpdt) alors que les musiciens de la Chambre le font à l’appel du roi.
– Ils reçoivent des défraiements qui constituent un salaire de base (“entretennement”). Il est constitué de trois points : *nourriture *transport *logement

NB : ce salaire est également versé aux officiers.

– Ils sont payés par les Menus Plaisirs ou par la Cassette (services administratifs)
– En plus peuvent se rajouter des gratifications et des pensions données par le roi.
– Le nombre des musiciens est variable selon les événements du règne et il dépasse celui des officiers. NB : les 2 listes se superposent.

2 – Les musiciens extraordinaires
– Apportent leur concours exceptionnel, leur service est irrégulier. Vivent soit de gratifications soit de pensions.
– Renforcent les effectifs lors de certains événements
– Ou bien sont des étrangers de passage que le roi veut entendre

3-Les musiciens suivant la cour
– musiciens mineurs qui n’ont pas de brevet donné par le roi. Nuance administrative : ils ne dépendent pas des mêmes services que les ordinaires. (voir M Benoît, op. cit. p. 178 et sq).

– A la fin du règne de Louis XIV, en joignant tous les musiciens on arrive à un total de 150 à 200 musiciens. 120 à 150 sont immédiatement disponibles pour n’importe quelle cérémonie.
– L XIV accroît le nombre des musiciens par rapport à la période précédente : plus de 80 à la Chapelle à la fin du règne.
– Comparer avec la maison de la Reine : 25 maximum. Un autre ex. d’un prince mécène : P. d’Orléans, en 1700 environ, emploie 12 artistes pour sa Chambre.

LES INSTITUTIONS MUSICALES : LES DÉPARTEMENTS

– Volonté de la part de Louis XIV d’une organisation centralisée et efficace et d’une grande qualité => doit servir la gloire de son règne.

Système hérité des Valois (notamment François Ier) et des 1ers Bourbons et élargi par L XIV

– On compte trois grands départements : la Chapelle, la Chambre et l’Ecurie (même si M Benoît classe l’Ecurie dans les départements secondaires dans le Que sais je). Leur ancienneté et leur prestige les font classer dans les 3 grandes institutions.
– Les départements secondaires : moins important pour la musique (l’Armée) ou bien autre gestion administrative (le Cabinet du Roi)

I – Grands départements

A/ La Chapelle

– Le sommet de la hiérarchie
– La Chapelle dirigée par le grand aumônier de France, évêque de la Cour et maître de la Chapelle
– 2 corps

* la Chapelle-oratoire : les ecclésiastiques célébrant la liturgie ainsi que les chantres-chapelains qui assurent l’exécution du plain chant (se reporter à M. Benoît, Picard, op. cit.)
* la Chapelle musique

– Tous deux sont sous la responsabilité du maître

Sous-maîtres
– La Chapelle musique est dirigée par les sous-maîtres, véritables chefs musicaux

* la création de cette charge remonte à François Ier (1543)
* au départ, ce sont des ecclésiastiques

– Sous L XIV : 2 s/s maîtres jusqu’en 1683 qui servent par “quartiers” (2 chacun), 1/4 d’année

* Henry Du Mont (est veuf et est devenu abbé) et Pierre Robert, 2 clercs nommés en 1663.

Réforme de 1683
– Puis en 1683, réforme avec la création de 4 postes par quartiers

* volonté d’ “une plus grande variété de musique” (C. de Blamont, préface de l’œuvre de Delalande, cf. Benoît, Picard, p. 185)
* le recrutement fait place à des laïques : P. Colasse et Delalande. Nécessité de recruter des personnalités musicales de 1er plan (les 2 autres sous-maîtres religieux : Goupillet et Minoret n’ont guère fait parler d’eux…)

– Un concours est organisé avec des éliminatoires. C’est à cette occasion que Charpentier s’est présenté pour le poste mais n’a pu concourir en raison d’une maladie

Rôle des sous-maîtres

* choisissent les motets pour les cérémonies ordinaires ou exceptionnelles
* dirigent les ensembles (avec l’autorité et le doigté nécessaires !)
* responsables de l’éducation des enfants de chœur (les “pages”) qui revient plutôt à un religieux
* recrutent les chantres
* cumule la “charge” de compositeur : il leur revient de composer la musique en priorité, mais d’autres peuvent aussi donner leurs œuvres : le surintendant de la Chambre (Lully), l’organiste.

NB : la charge de “compositeur” est plutôt un emploi honorifique avec des “services irréguliers et des fonctions imprécises” (Benoît, Picard, p. 184). La plupart du temps sous-m et compositeur ne font qu’un.

– les grands noms: De Lalande, Campra en 1722
– poste le plus prestigieux et le mieux payé

Chantres professionnels
– pour différencier des chantres-chapelains
– sortent des maîtrises et églises de Paris
– le corps de plus en plus laïque sous L XIV
– Apogée de ce corps en 1702 dû au dvt du prestige royal et la dévotion de Mme de Maintenon. Leur nombre est d’environ 60

* participent aux petits et grands motets, aux psaumes et hymnes à plusieurs voix
* effectif employé est variable, selon les circonstances avec parfois le renfort des musiciens de la Chambre

– Ensemble exclusivement masculin
– Se répartissent schématiquement en

* dessus -> les enfants et castrats (ceux-ci presque tous italiens, c’est une mode d’outre-monts). Dessus “mués” => les falsettistes
* haute-contre : ténor à la française aux aigus puissants et timbrés
* ténor ou taille : un peu plus bas
* basse-taille : baryton
* basses, dont 3 basses jouant du serpent
* Les femmes viennent à titre exceptionnel comme solistes (infl du rôle grandissant de l’opéra).

– NB : le chœur français à 4 ou 5 voix est particulier : les voix de dessus sont très nombreuses. Le reste des parties est composé uniquement de voix d’hommes => masse harmonique dense et grave avec une voix supérieure aux effectifs importants.
– En général le chœur est à 5 voix à la Chapelle et à 4 voix à l’ARM (sans les basses-tailles). Voir le Nisi Dominus de Du Mont.

Les pages de la Chapelle

* 8 enfants par trimestre (donc 16) en général
* engagés vers 8-9 ans et libérés à la mue. Peuvent revenir avec leur voix d’homme
* proviennent des maîtrises de Paris et province
* sont éduqués: matières littéraires (grammaire, latin), religieuses et musicales (chant avec 1 ou 2 instr., luth, clavecin, viole, orgue).

L’orchestre ou symphonistes
– Instr traditionnels à l’église : cornets et serpents pour doubler les voix aiguës et basses

– Mais en raison du dvt du grand motet et infl du style concertant, les autres instr font leur entrée à la Chapelle et l’orchestre devient de plus en plus important

– Les instr apparaissent à l’époque de Du Mont vers 1660-1670. Lully contribue à normaliser cet usage pour les cérémonies solennelles
– en 1702 la famille des violons est au complet

*4 dessus
*1 haute-contre
*1 taille
*1 quinte
*3 basses et 1 théorbe

– NB orchestre à 5 parties avec 3 parties d’alto. Ces instr sont de taille légèrement différente et sont écrit en ut 1, 2 et 3. Ils s’accordent de la même manière (cf “Tessiture” dans le Dictionnaire de M Benoît, op. cit.). Cf plus loin la Chambre;
– De même, à la même date :

2 fl d’Allemagne
1 basson
1 cromorne

– pour les grandes occasions, les musiciens d’autres départements pouvaient renforcer cet orchestre : comme les hautbois

– sous L. XIV, pas de charge d’officiers, les instr comme les violons sont encore trop proches du monde profane.

– L’organiste
– Place prééminente, poste d’officier
– A partir de 1678, 4 organistes par quartier et non plus un seul

* accompagnent, improvisent et composent des versets joués en alternance avec le chœur (plain chant pour les messes solennelles)
* accompagnent les petits et grands motets
* peuvent être également clavecinistes (Couperin, Marchand)

– nature de leur service encore vague, alors qu’à Paris, il est fixé par le Cérémonial parisien de Martin Sonnet (1662).
– L’instrument : mystères sur sa composition jusqu’à l’établissement de l’orgue de Clicquot en 1710 dans la dernière chapelle de Jules Hardouin Mansart (plans) et Robert de Cotte.

Postes divers:
facteur d’orgue (Clicquot, 1709-10: grand orgue de la Chapelle définitive)
-noteurs ou copistes, porteurs d’instruments et pointeur chargé de relever les absences.

Conclusion
– Les années 1683-1687 sont cruciales pour la Chapelle :

* sanctuaire spacieux à Versailles, même s’il a changé plusieurs fois de place (4) et est définitif en 1710.
* mariage avec Mme de Maintenon et donc dvt de la musique religieuse

– Concours de 1683 : 4 sous-maîtres
– augmentation sensible du personnel (+ de 80 d’après un témoin, cf. Benoît, Picard, p. 194)

– L’apogée: 1683-1720 jusqu’à la réforme du Régent pour des raisons financières et aussi musicales (introduction d’un nouveau style).

– Chapelle admirée des étrangers, des témoins du temps

Saint-Simon : sa musique est “fort au dessus de celle de l’Opéra et de toutes les musiques d’Europe” Mémoires, (cité in Montagnier, Gervais, p. 174). Il y voit un “spectacle admirable” (id p. 186).

– Exemple de mécénat royal qui renforce l’image du règne, même dans le domaine religieux
=> Volonté d’éblouir la Cour et les étrangers
=> Volonté d’attirer les meilleurs musiciens et de les fixer à la cour
=> volonté d’un répertoire varié et de qualité

B/ La Chambre

– L’origine remonte à François Ier (comme l’Ecurie)
– Pas de fonctionnement quotidien comme la Chapelle, mais à l’appel du roi.
Le personnel est légèrement plus réduit que celui de la Chapelle
– Fusionne souvent avec la Chapelle. D’après l’Etat de la France (1674 et 1684), pour les grandes cérémonies, comme les sacres, mariages ou offices particuliers (Ténèbres) : à nuancer car collaboration plus étendue.

1 – Surintendant
– poste prestigieux, largement rétribué (2257 l.) : poste d’officier, logé par le roi au Grand Commun
– Le poste est lourd : il y a 2 surintendants par semestre

Ex du temps de Lully : lui-même + Jean-Baptiste de Boesset. Puis M R Delalande, P. Colasse, Destouches. Les plus grands noms de l’époque

– Direction musicale du département

* choix des musiques pour les différentes circonstances
* répétitions des œuvres. Elles peuvent être nombreuses, 3 fois par jour et même le dimanche
* direction
* collaboration avec les sous-maîtres de la Chapelle pour les grandes circonstances. Provoque pfois des querelles, notamment dans les choix d’interprétation.
* rôle administratif: veiller à la bonne marche du département (présence, règlement des musiciens). Centralise les sommes d’argent à redistribuer aux musiciens
* Il doit loger les pages chez lui et en reçoit les défraiements. Il a également à son service un page “mué”.

2 – Le Maître
– Poste aussi prestigieux. Ne dépend pas du surintendant
– c’est svt lui qui assume cette charge.
– 2 maîtres par an (1 par semestre)

* formation des pages de la Chambre (3 pages en tout)
* recrutement (les pages ne restent pas longtemps à cause de la mue)
* type d’enseignement: grammaire, chant, instr., danse par des professeurs spécialisés

– Peut remplacer le surint pour la direction

M. Lambert en 1661 (beau-père de Lully).
Lully en

3 – Compositeur
– La charge est divisée en semestre en principe, mais selon les années elle peut être par trimestre.
– Si la charge peut se transmettre, elle est directement liée au choix du roi qui la donne en récompense à un musicien qu’il estime (M. Benoît, Picard, p. 196)

Ex en 1686 :Lully possède le 3e et 4e trimestre, Delalande et Colasse les autres.
En 1702, Delalande, 3 trimestres.

– d’abord des postes avec des tâches particulières “compositeur de la mus. instr.” ou “c. des Entrées de ballet” : liés au Ballet de cour avec les collaborations de musiciens.
– avec Lully et à la fin du règne, la spécialisation tend à disparaître : le même compositeur prend tout en charge.
– Le compositeur peut travailler tt le temps : son service est irrégulier et lourd.
– Même si ses œuvres ont la priorité à la cour, d’autres compositeurs peuvent se faire entendre sans avoir la charge

– La trilogie : surintendant, compositeur, maître domine le département (direction, éducation , composition)
– svt assurée par une seule personne (Lully, Delalande) : dans ce cas il s’agit d’une certaine domination qui reflète un parti pris de centralisme.
– Ne pas penser cpdt que Lully possède tous les postes : il n’a pas comme Delalande de charges à la Chapelle. Il domine surtout la musique profane et bien sûr l’opéra.
– De même d’autres compositeurs que lui sont joués : M. Lambert (Ballet de cour), Charpentier pour les Divertissement de Versailles, Le Malade imaginaire en 1674 (a sans doute aussi dirigé orch et chœur) cf. M Couvreur p. 266-267.

4  -Musiciens : répartis dans ensembles à géométrie variable (chanteurs), ou en ensemble symphonique (les Violons) ou peuvent jouer en mus. de chambre ou en solistes

a – le chœur et solistes vocaux (ou chantres)

– Ce n’est pas un “corps”, une troupe à proprement parler : une réserve de voix à qui l’on fait appel irrégulièrement

* à la mort de L XIV : 40 environ, dont des castrats italiens + les 3 pages
* les chanteurs peuvent se produire en solistes
* certains appartiennent aussi à la Chapelle
* les femmes peuvent briller (Hilaire Dupuy, belle-sœur de Lambert). Elles sont plutôt invitées, surtout celles qui viennent de l’ARM.

b – Claveciniste

– poste important et écrasant par son rôle musical, une seule charge à la différence de la Chapelle. Sous L. XIV, la famille d’Anglebert possède l’office pdt 80 ans !
– Les organistes se produisent aussi comme claveciniste : F. Couperin (survivancier de la charge de d’Anglebert).

c-Instrumentistes

– Une quinzaine environ appelés alternativement ou ensemble

* luth (en déclin), théorbe, basse de viole
* flûtes
* violons solistes

– NB : pas de hautbois, car ils proviennent de l’Ecurie

d – Les “24 violons du roi” ou Grande Bande
– reconnus officiellement sous L XIII vers 1626 (avec leur nom de “24 violons du roi” : le 1er orchestre officiel. Mais encore méprisés car liés au monde profane de la danse
– Lully sous L XIV va en faire un orchestre de qualité et reconnu. Quand ils entrent à la Chapelle, ils sont désormais considérés comme tous les autres instr : c’est une consécration.
– Corps prestigieux sous L. XIV. Joue : soupers du roi, bals, fêtes fixes mais aussi ballets et opéras.
– jouent aussi en soliste

Formation caractéristique de la mus. française: à 5 voix
– Vers 1650

* dessus (6 instrumentistes
* haute-contre, taille, quinte (4-4-4) = la partie d’alto moderne
* basses de violon (6)

– polarisation dessus/basses

* la basse de vl: plus grande et plus grave que le vlc, accordée en sib. parfois 5 cordes.
* formation différente Italie à la fin du XVIIe

– Les 3 parties intermédiaires: remplissage. Elles sont de taille différente avec le même accord (clés différentes). Les répartitions dans les pupitres changent suivant les époques

5 – Autres métiers
– Imprimeur : la famille Ballard (payé plutôt à la commande)
– Noteur : rôle très important, car l’édition coûte cher. Les partitions sont copiées pour les divertissements et spectacles, sous la surveillance du surintendant.
– Atelier de copie pour la Bibliothèque royale de musique. André Danican Philidor dès 1684 dirige une équipe au service du roi et du comte de Toulouse. Réunit les œuvres majeures du règne (conservées à la BN, fonds Philidor). Volonté de garder une trace des œuvres du règne, comparable aux relations des fêtes et divertissements par Perrault et Félibien. Rejoint la volonté de créer un “siècle” de L. XIV comme celui d’Auguste ou d’Alexandre (cf. M Couvreur, pp. 40-41).
– Garde des instruments : entretien, accord, transport, facture. Charge créée par L XIV en 1662 (officier). Pour économiser L XIV a supprimé la charge de “Nain du roi” pour créer ce poste ! (Benoît, Picard, p. 214)

C/ La Grande Écurie
– Corps d’élite hérité de François Ier. Le nom provient du logement près de l’écurie royale
– Deux corps : grande Écurie (pour la guerre et les manèges), la Petite Écurie (chevaux de selle et de carrosses). Dirigés par le Grand Écuyer
– A Versailles, logée dans la Grande Écurie de Mansart.
– Les vents dominent
– Intervient

* surtout dans les cérémonies officielles : réceptions, sacre, mariage, Pompes, etc
* fêtes de plein air et chasse

– mais collabore aussi avec la Chapelle et surtout la Chambre
– Département qui évolue fortement sous L XIV : réforme des anciennes structures. Certains noms sont gardés mais ne correspondent plus aux instr employés.

– 4 groupes administratifs importants (L XIV)

* Trompettes : Trompettes et timbales (12)
* Douze Grands Hautbois (htbs, bassons, serpents) 12 (violons jusque vers 1650)
* Htbs et musettes du Poitou: en réalité htbs et fl traversières et à bec. 6
* Fifres et tambours: fls, htbs, bassons, percussions. 6
(* Cromornes et trompettes marines)
* = 36/40 instr.

– Les vents dominent, même si sous Louis XIII ou jusqu’en 1650 environ il y avait des violons dans l’ensemble de Douze grands hautbois (ils partent sans doute à la Chambre à cette époque).
– Mais le système est complexe et pas encore bien connu

– Les trompettes : certaines d’entre elles sont à la Chambre et à l’Ecurie
– Les tr qui accompagnent le carrosse royal : les plus prestigieuse

– précieux terrain d’essai aux grandes dynasties de musiciens

* favorise le dvt de la facture des vents et celui de l’orchestre (timbres, technique).
* fl et htb sont admirés en Europe.

– En réalité, l’Ecurie fournit 1 précieux renfort de vents aux autres départements (Ballets, divertissements, opéras).
– Trois types de musiciens interviennent dans la vie musicale de la cour

* tr et htb de caractère guerrier
* bande de htb et bassons “sœur de la bande de 24 violons” (Benoît, picard, p. 231) avec la Chapelle et la Chambre
* solistes pour des concerts intimes : Philidor, Hottetere, Chédeville.

II – Départements secondaires

A – Le Cabinet du roi
– Musiciens dont la présence est indispensable au roi. Il désire les rétribuer autrement pour ne pas alourdir le budget de la Chambre ou Chapelle => représente bien la volonté du roi pour une musique de haute qualité et son souci de la vie musicale
– 3 types d’artistes :

1 – Artistes français que le monarque convoque à son bon plaisir
2 – artistes italiens : ne peuvent être maintenus en France ou officialisés
3 – Les Petits Violons ou La Petite Bande
– postes d’officiers. Certains peuvent passer à la Chambre, d’autres font partie de la Chambre ou de la Chapelle en même temps.
=> témoignent du rôle de L XIV sur la musique et du développement de l’orchestre à cordes français (grâce à Lully).
– origine : créé pour L XIV jeune vers 1648, dévolu ensuite à Lully (NB arrivée de Lully à la cour vers 1653)

* volonté de Lully de mettre au point un ensemble où il puisse expérimenter sa propre technique d’exécution (précision, coups d’archets communs, pas d’ornements ajoutés)
* mais il n’y a pas vraiment de rivalité entre les 2 bandes de violons. Lully utilise l’une et l’autre
* d’abord 20 puis 24. Même formation que la Grande Bande

– Très bien rétribués car participent de manière importante à la vie de la Cour : lever et coucher du roi, gondoles, bals et bien sûr spectacles. Suivent pratiquement le roi.
– après 1661, les 2 orchestres peuvent jouer ensemble ou s’alterner.
– En fait le découpage administratif revêt peu d’importance pour les interventions musicales et le rôle de cet orchestre.

B – L’Armée
– Gardes du corps : tr timbales
– Cent-Suisses précèdent le cortège royal se rendant au sanctuaire (3 tambours, fifres)
– Mousquetaires

CONCLUSION

“Une armée d’artistes et d’artisans” M Benoît, Que sais je, p. 36
1 – La musique sert l’image royale

* centralisation et réorganisation
* volonté de posséder une musique à l’échelle du règne (qualité, variété)
* interventions personnelles de L XIV. Mais ne pas oublier le rôle de ministre comme Colbert.

2 – Prestige des postes à la cour pour les musiciens

  • Un poste à la cour impose une obligation de présence à son poste

* L XIV ne se sépare pas volontiers de ses musiciens (à la diff. de l’Italie qui inonde l’Europe de ses musiciens)
* Les artistes sont coupés d’une formation ou d’un séjour à l’étranger (sauf exception comme M-A Charpentier)

– Ce qui implique

* la continuité d’un art national
* la coupure avec les influences étrangères ou méconnaissance des musiques venues d’ailleurs (surtout outre-Rhin)

– Mais des ms circulent et à la fin du XVIIe, existence de foyers italianisants.

– Les institutions sont au service de la vie musicale intense de la cour.